facebook pixel

Pourquoi je déteste l’urgence en marketing (et pourquoi ça marche)

par Alexe Martel
Temps de lecture : 5 minutes

Aujourd’hui, je m’attaque à la tactique de manipulation préférée des marketeurs : créer un sentiment d’urgence chez leurs clients potentiels.

C’est une tactique que j’ai moi-même utilisée à plusieurs reprises pour vendre mes produits et ceux de mes clients. En toute honnêteté, je le regrette aujourd’hui.

Parce que je ne crois pas — enfin, je ne crois plus — que c’est 1) nécessaire et 2) éthique.

Dis-moi, est-ce que tu fais des achats impulsifs, des fois?

Moi, j’ai une fâcheuse tendance à dépenser… que je contrôle presque parfaitement (pour vrai!) grâce à une règle simple mais magique que je vais t’enseigner aujourd’hui : la règle des 7 jours

Cette règle a changé ma vie. À elle seule, elle a fait de moi une personne plus responsable financièrement, capable d’économiser et de faire des achats intelligents. Elle m’a aussi permis de me débarrasser pour de bon du sentiment de culpabilité désagréable qu’on ressent quand on regrette un achat impulsif.

Aujourd’hui, quand j’achète quelque chose, je le fais par choix, pas parce que ça fait plaisir à mon cerveau.

Je m’explique. Tu m’as sûrement déjà entendue dire qu’acheter, ça fait mal — même que l’épisode 2 de mon podcast, 15 minutes de persuasion est dédié à ce principe — mais savais-tu qu’acheter, ça fait aussi du bien? 

Ça fait pas de bien longtemps (on a tendance à regretter nos achats impulsifs), mais ça fait du bien sur le coup. Acheter sans se soucier du futur, impulsivement, émotionnellement, ça nous donne une gratification immédiate. Pour les personnes naturellement impulsives, par exemple les TDAH comme moi, c’est presque irrésistible… et même pour un individu neurotypique, plusieurs facteurs vont rendre l’achat impulsif attirant : le stress, la fatigue, à quel point ton environnement est rangé, etc. 

Et là, mes amis marketeurs ne vont pas m’aimer mais… 

C’est pour ça que plusieurs entrepreneurs vont essayer de te faire sentir que tu dois prendre ta décision rapidement

Tsé quand tu sors d’un appel avec un coach et qu’il te donne un prix spécial… si tu prends ta décision dans les prochaines 48 heures?

Quand tu suis un lancement et que les personnes qui achètent en premier se méritent un fast-action bonus

Ou quand tu magasines sur Etsy et qu’on te rappelle que « 10 personnes ont le même article dans leur panier » (sous-entendu : grouille-toi ou il n’y en aura plus)?

Une décision d’achat, surtout pour un gros montant, c’est complexe. Si tu dois te décider dans un temps limité, tu n’auras pas le temps d’analyser les choses correctement. Tu vas prendre ta décision en te basant sur des heuristiques, des p’tits raccourcis mentaux que ton cerveau emprunte pour économiser son énergie cognitive. 

En plus, quand tu dois prendre ta décision vite, ça te met un stress. Et un humain stressé, statistiquement, a plus de chances de faire un achat impulsif. 😕

Autrement dit, les marketeurs, en te poussant à prendre une décision rapide, t’empêchent de prendre une décision réfléchie.

Pis là, il faut se demander :

C’est quoi, au juste, une bonne décision d’achat? 

Dans ma formation sur le pricing, je parle du coût d’opportunité, un concept que j’ai découvert dans ce livre que je te conseille fort si tu veux mieux dépenser ton argent. 

Pour faire simple, à toutes les fois que tu dis « oui » et que tu dépenses de l’argent… ben tu es en train de dire « non » à toutes les autres choses que tu aurais pu faire avec cet argent. 

Bon, dit comme ça, ça a l’air simple. Mais ce l’est pas pantoute. Notre cerveau a énooormément de difficulté à appréhender le coût d’opportunité. À la place, il va se tourner vers les heuristiques (tu te souviens, ce sont les p’tits raccourcis mentaux) pour prendre une décision plus efficacement (pour ne pas y passer toute la journée quoi). 

Je te donne un exemple concret : 

Imagine que tu achètes une paire de chaussures à 60$. Le petit vendeur t’explique que si tu te déplaces à 5 minutes de là, dans un autre magasin, tu peux avoir la même paire de chaussures à 40$. 

Est-ce que tu te déplaces pour sauver 20$? La plupart des gens disent oui.

Maintenant, imagine que tu magasines un beau set de patio. Tu trouves le set parfait pour 1060$. Puis, le vendeur t’explique que tu peux obtenir exactement la même chose pour 1040$. Tu n’as qu’à te déplacer à 5 minutes de là. 

Est-ce que tu te déplaces pour sauver 20$? Ici, la plupart des gens répondent qu’ils ne vont pas y aller.

Pourtant, dans les 2 cas, le coût d’opportunité est le même : 5 minutes pour économiser 20$… mais à la place de calculer le coût d’opportunité, on considère l’économie de 20$ relativement au prix total, de 60$ ou 1060$. Tu vois le p’tit raccourci? 

Tout ça pour dire qu’évaluer le coût d’opportunité tout le temps, pour toutes tes décisions d’achat, c’est im-po-ssi-ble. C’est pas une super stratégie pour éviter les achats impulsifs, c’est plus une stratégie pour angoisser à toutes les fois que tu sors ton portefeuille. 😅

Moi, j’ai un truc un peu jambon, mais efficace, pour éviter les dépenses impulsives.

C’est pas révolutionnaire pantoute, mais ça marche.

Pour éviter d’acheter quelque chose impulsivement — et de le regretter par la suite — j’applique systématiquement la règle des 7 jours :

À toutes les fois que je veux acheter quelque chose qui coûte plus que 100$, j’attends 7 jours avant de l’acheter.

Oui-oui, c’est tout.

Pour les achats plus petits — un café, une barre de chocolat, un porte-clef de koala… — tu peux remplacer par la règle des 15 minutes. Ça suffit.

Depuis que j’applique cette règle dans ma vie, je ne regrette jamais mes achats. Si après 7 jours j’ai encore aussi envie d’acheter quelque chose, généralement, c’est que c’est un désir fort, pas juste un besoin de gratification rapide ou la peur de passer à côté de quelque chose (le fameux FOMO).

Quand quelqu’un me met la pression pour que je prenne ma décision rapidement, je lui explique ma règle. S’il ne respecte pas mon besoin de prendre une décision qui me fait sentir bien, c’est un red flag majeur pour moi : je passe mon chemin.

Surtout, je donne la même chance à mes clients.

Je pense qu’on a une responsabilité, en tant que marketeurs, en tant qu’entrepreneurs, d’aider nos clients à acheter librement.

Plus je comprends le fonctionnement de notre beau cerveau humain, plus je prends conscience de ma responsabilité comme personne qui vend des choses. Je me verrais mal utiliser des tactiques qui empêchent mes clients potentiels de prendre une décision « libre et éclairée », comme on répétait dans mes cours de droit.

Cette responsabilité est peut-être encore plus grande pour moi, puisque j’enseigne la persuasion et le pricing stratégique à des centaines d’entrepreneurs.

Est-ce que ça veut dire que toute notion d’urgence doit être évacuée de notre marketing?

Je ne pense pas. Parfois, l’urgence est réelle. Par exemple, quand une formation fonctionne par cohorte, ou quand un produit est offert en quantités limitées pour de vrai.

Mon problème, c’est quand on « invente » de l’urgence pour pousser notre client à prendre une décision sous pression, juste pour vendre plus, plus vite. Autrement dit, quand on se soucie juste de ce qui est bon pour notre compte en banque, en ignorant ce qui est bon pour notre client.

Quelques idées pour offrir un espace décisionnel plus libre à nos clients :

  • Annoncer qu’il va y avoir une promotion plusieurs jours d’avance. J’ai vu plusieurs entreprises le faire pour ce Black Friday, ce qui va me permettre de profiter de leurs rabais et de respecter ma règle des 7 jours. 😉
  • Pour ceux qui vendent des formations en ligne par lancements, arrêter de récompenser les acheteurs impulsifs (par exemple avec un fast action bonus) et étirer nos promotions sur au moins une semaine, pour laisser le temps à nos clients d’avoir une vraie réflexion.
  • Offrir des garanties sans conditions, qui permettent aux acheteurs impulsifs de revenir en arrière sans avoir à se justifier.

Quand je dis ça aux gens, je rencontre parfois une certaine résistance. Ce que j’y vois, c’est surtout de la peur. La peur de ne pas vendre sans l’urgence et les achats impulsifs.

Pourtant, tout le monde préfère travailler avec des clients engagés, qui trippent sur nos produits/services pour de vrai, qui sont fiers de leur achat et qui deviennent des ambassadeurs.

Si t’es pas capable de vendre sans mettre la pression aux gens, t’as un problème de persuasion. Pis on peut s’en parler.

0 commentaires
Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *